PARIS PARTAGÉ

ET SI UNE VAGUE MIGRATOIRE INSTAURAIT UNE NOUVELLE LOGIQUE DU PARTAGE À PARIS ?

En 2050, la France, et particulièrement la région parisienne, fait face à un afflux migratoire de grande ampleur : réfugiés, migrations économiques, migrations régionales provoquées par le réchauffement climatique. 

© CAUE de Paris - Jean-Baptiste Vicquelin

Celui-ci n’épargne pas la moitié sud du pays et nombreux sont celles et ceux qui font le choix de « monter au Nord », transitant ou s’installant à Paris. Pour accueillir ces nouveaux arrivants sur le territoire déjà soumis à une forte pression urbaine et à une pénurie de ressources, la Ville de Paris instaure une nouvelle politique du partage.

Il s’agit de changer de rapport à la propriété individuelle en acceptant l’usage partagé de certains biens particulièrement précieux ou coûteux sur le plan de la santé environnementale. Les Parisien·ne·s sont sollicités régulièrement pour décider ensemble des biens matériels, immatériels et numériques qui deviennent des communs, dont les usages et la gestion sont désormais organisés de manière collective à l’échelle des quartiers. La voiture, les jardins potagers, l’accès à Internet, les productions culturelles sur le sujet de la transition énergétique, écologique et de la résilience… perdent leur statut de propriétés individuelles pour profiter à tous.tes, dans une logique de solidarité et de partage des ressources.

L’habitat partagé est érigé en nouveau standard dans la construction et permet de multiplier les espaces de cohabitation : cuisine, espace de travail, espace de convivialité ou de repos sont des lieux partagés par plusieurs habitants d’un même immeuble. La promiscuité est rendue confortable par l’usage de matériaux isolants à haute performance et d’outils de gestion collective qui facilitent la rotation des usages et l’entretien des lieux. On voit aussi apparaître des dispositifs partagés de stockage de données numériques ; la chaleur dégagée par ces micro-data centers intégrés aux habitats est exploitée pour les usages domestiques, dans une logique d’économie d’énergie.

L’espace public fait aussi l’objet de transformations pour devenir l’espace « des publics », plus accessible et inclusif. Des zones de friche sont laissées ouvertes à l’aménagement par la population : on débat et on décide collectivement des usages souhaités sur le lieu, puis on s’organise pour construire ensemble le mobilier ou l’infrastructure légère et réversible.

Pour celles et ceux « qui n’ont rien à mettre en partage », à commencer par les personnes sans lieu de vie fixe et les personnes de passage comme les touristes, la Ville de Paris propose d’adopter une monnaie locale et solidaire permettant de convertir tout effort pour la cause environnementale en valeur monétaire. On peut ainsi donner une portion de son temps pour accomplir des micro-actions qui aident au maintien de la biodiversité, à l’entretien des espaces verts, au recul des pollutions, à l’économie circulaire, etc. Il est aussi possible de donner du temps pour partager des connaissances, ou encore des contenus en ligne qui contribuent au rayonnement de Paris en tant que capitale écologique. En échange, les contributeur·ice·s reçoivent de l’argent à dépenser localement dans une sélection d’activités – musées, transports, cinémas, restaurants… – et de services locaux qui s’inscrivent dans une démarche de production locale, utile, solidaire et soutenable.

▌FRAGMENTS ISSUS DE CE FUTUR

Échelles de la ville, du quartier, du foyer/de l'invidividu

→ Les Assemblées Citoyennes du Partage (ACP)
Lors de ces assemblées, un panel de Parisien·ne·s discute de la liste des biens matériels, immatériels et numériques qu’elles et ils proposent de passer en communs. Plusieurs critères sont pris en compte pour procéder à leur sélection et priorisation : le gain environnemental, la solidité et la résistance à l’usage, le potentiel d’éducation populaire, la réduction des inégalités… La décision finale du passage en commun revient aux Conseils de quartier.

→ Habibitat
Habibitat est un outil de gestion collective pour prendre soin des ressources mises en commun dans les habitats partagés. La plateforme permet de consulter les fluctuations du bilan carbone et énergétique de l’ensemble du logement en fonction des acquisitions d’équipement et des usages qui en sont faits, l’objectif étant de se maintenir sous un certain seuil. Outil d’aide à la décision collective, Habibitat se veut un dispositif de transition, en attendant que la confiance et les bonnes pratiques s’installent définitivement au sein des logements.

→ La cryptomonnaie Kapitale
Cette cryptomonnaie proposée par un acteur privé vient concurrencer la monnaie d’échange locale et solidaire de la Ville de Paris. Sur le même principe de rémunération des comportements éco-responsables en valeur monétaire, la Kapitale cible les habitant·es les plus aguerri·es aux outils numériques, répliquant une forme de privilège pour celles et ceux qui sont déjà en capacité de s’engager dans des modes de vie plus respectueux de l’environnement. Le maillage de Paris par une diversité de capteurs et leur suivi en temps réel par des intelligences artificielles pose aussi des questions quant à la surveillance permanente et au coût carbone de la Kapitale.

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INFORMATIONS

SÉLECTION DE TENDANCES ET SIGNAUX
Sources d’inspiration dans le présent pour ce futur...

 

→ Le changement climatique, selon l’Organisation des Nations Unies, pourrait causer le déplacement de 250 millions de personnes dans le monde en 2050. Lien

 

→ Les valeurs d’altruisme, de solidarité, de tolérance progressent au sein de la société française. Lien

 

→ Des études démontrent que la capacité d’un individu à mobiliser son capital social, ainsi que la présence de lieux favorisant le lien social au sein d’un quartier, constituent des atouts clés pour affronter les crises écologiques, économiques ou sanitaires. Lien

 

→ Destiné aux personnes en situation de handicap et aux personnes âgées, l’habitat inclusif (aussi appelé API) est une forme de logements, groupés ou partagés, qui combine en un même lieu des espaces de vie privatifs individuels et des espaces de vie communs, dans un environnement adapté et sécurisé. Ce mode d’habitat est assorti d’un projet de vie sociale et partagée. Lien

 

→ Les biens communs, ou tout simplement « communs », sont des ressources, gérées collectivement par une communauté ; celle-ci établit des règles et une gouvernance dans le but de préserver et pérenniser cette ressource. Lien

 

→ On note la progression de l’implication citoyenne dans la gestion de dispositifs « communautaires » complexes : villes en transition, jardins partagés, tiers lieux…

 

→ L’idée de droit à la ville (DALV) revient au philosophe et sociologue Henri Lefebvre, qui, en 1968, publiait un court manifeste intitulé Le droit à la ville. Entendu comme un droit de base, le concept de DALV est constitutif de la démocratie, il définit les villes comme des biens communs accessibles à tous les habitants. Lien

 

Texte d'inspiration proposé par le studio Design Friction pour nourrir la démarche de prospective créative « Vers Paris 2050, affronter ensemble les défis de notre siècle ». Ce texte imagine un futur possible pour Paris à l’horizon 2050, selon l’impact des différents chocs qui pourraient survenir (changements climatiques et catastrophes naturelles, crise de la biodiversité, raréfaction des ressources, etc...). Il vise à inspirer les contributeurs de la démarche et à nourrir les débats.

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